Jeune fille du caboulot, De quel pays es-tu venue Pour étaler ta gorge nue Aux yeux du public idiot ? Jeune fille du caboulot, Il te déplaisait au village De voir meurtrir, dans le bel âge Ton pied mignon par un sabot. Jeune fille du caboulot, Tu ne pouvais souffrir Nicaise, Ni les canards qu'encor niaise Tu menais barboter dans l'eau. Jeune fille du caboulot, Ne penses-tu plus à ta mère, À la charrue, à ta chaumière ?... Tu ne ris pas à ce tableau. Jeune fille du caboulot, Tu préfères à la charrue Écouter les bruits de la rue Et nous verser l'absinthe à flot. Jeune fille du caboulot, Ta mine rougeaude était sotte, Je t'aime mieux ainsi, pâlotte, Les yeux cernés d'un bleu halo. Jeune fille du caboulot, Dit un sermonneur qui t'en blâme, Tu t'ornes le corps plus que l'âme, Vers l'enfer tu cours au galop. Jeune fille du caboulot, Que dire à cet homme qui plaide Qu'il faut, pour bien vivre, être laide, Lessiver et se coucher tôt ? Jeune fille du caboulot, Laisse crier et continue À charmer de ta gorge nue Les yeux du public idiot. |
POÈME DE CHARLES CROS MUSIQUE DE MICHEL AGNERAY |