Dansons la capucine ! Y a pus d' parents chez nous : Maman est à l'usine, Papa est chez les fous, You ! Dansons la capucine, Ou bien jouons à coucou La faim nous assassine, Le froid nous tord le cou. La sal' fièvr' nous lancine Et nous met sens d'ssus d'ssous ; Pour ach'ter d' la méd'cine, Nous n'avons pas d' gros sous, You ! On s'arrach' la poitrine, Déchiré' par la toux ; Nous n'avons pas d' farine, Afin d' fair' du pain roux. Y en a chez la voisine, Y a mêm' de beaux joujoux ; On s'amuse, on cuisine, Mais ce n'est pas pour nous, You ! Y en a qu'une mèr' câline Et berc' sur ses genoux, Qu'ont des rob's de mouss'line ; Sûr'ment, ça n'est pas nous. Voir toujours la famine, Ça vous rend très jaloux ; On enrage, on rumine Des carnag's comm' les loups, You ! La vie est un' gredine Et les homm's des voyous : Nous voudrions qu'on dîne D'autr' chos' que des cailloux. Dansons la capucine ! La mort aux yeux si doux Est là qui nous fascine, Nous irons dans des trous ; You ! Dansons la capucine ; Car nous mang'rons les choux Bientôt par la racine ; C'est assez bon pour nous ! |
POÈME DE EUGÈNE HÉROS MUSIQUE DE MICHEL AGNERAY |