Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? Je suis un fieu né en Flandre, Je ne sais où. On m'a trouvé dans la cendre Comme un grillou. Ma naissance fit esclandre, Car j'étais fou. Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? Fou, fou, en venant au monde, Le roi des fous ! Ma mère n'étant pas blonde, Moi je fus roux. Et l'on me dit à la ronde : D'où venez-vous ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? D'où je viens, moi petit homme ? Je n'en sais rien. Là-bas, plus haut que la Somme, On n'est pas bien, Car le ciel y est froid comme Le nez d'un chien. Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? Je viens d'un lieu où l'on entre Et d'où l'on sort. C'est au plus creux de cet antre Qu'est notre sort. Quand ma mère ouvrit son ventre, Je pris l'essor. Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? Je pris l'essor, et mes ailes Dans le ciel bleu Ont fondu comme chandelles Qu'on jette au feu. Aussi, nulle entre les belles Ne m'aime un peu. Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? Mais à l'amant qui assiège En soupirant Leur cœur, plus léger qu'un liège Sur un torrent, Je vends pour deux liards un piège Crac ! qui les prend. Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? Mon piège est un sac en serge Noir comme un trou, Où chante un papillon vierge Piqué d'un clou, Et où flambe comme un cierge Le cœur d'un fou. Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège, Mon joli piège ? Ah ! qui donc m'achètera Mon joli piège à rat ? |
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POÈME DE JEAN RICHEPIN MUSIQUE DE MICHEL AGNERAY |